Rue Saint-Honoré
La façade principale
L’église Saint-Roch se situe à l’emplacement d’une chapelle, dressée en 1521 et dédiée à sainte Suzanne, puis d’une première église, dédiée à saint Roch. L’édifice actuel est issu d’une longue période de construction, qui nécessita l’intervention de plusieurs architectes.
Jacques Lemercier dessina le plan et éleva le corps de l’église entre 1653 et 1690. Interrompu dès 1660, relancé en 1690, le chantier connut une nouvelle période d’interruption, avant de redémarrer grâce à un don du financier Law. Entre 1706 et 1710, Jules Hardouin-Mansart bâtit la chapelle de la Vierge, en prolongement du chœur vers le nord. En 1736-38, Robert de Cotte conçut la façade qui manquait encore à l’église. L’architecte lui-même ou son fils, Jules-Robert, mena ce nouveau chantier.
Conformément au répertoire classique, la façade principale de l’église Saint-Roch présente deux ordres superposés. Au rez-de-chaussée, d’imposantes colonnes à chapiteau dorique encadrent la porte centrale et les portes latérales, placées en léger retrait et surmontées d’une voûte en cul-de-four. Le rez-de-chaussée se termine par un entablement comprenant, sous une corniche saillante, une frise à triglyphes et métopes. Chaque extrémité de la corniche est occupée par deux groupes sculptés, posés sur de hauts socles.
Les colonnes corinthiennes de l’étage reprennent la même disposition que les colonnes du rez-de-chaussée. Elles encadrent une baie percée en plein cintre et supportent un fronton, dont la base interrompue laisse déborder une coquille formant un parchemin, avec les lettres « S R » (pour « Saint Roch »). Des ailerons amortissent la liaison entre les deux niveaux.
La nef
L’église Saint-Roch adopte un plan en forme de croix latine, avec un transept peu saillant. Des arcades en plein cintre, finement moulurées et surmontées d’une agrafe à motif floral, séparent la nef et les bas-côtés. Des piliers carrés, flanqués de pilastres doriques, se dressent entre les arcades : ils soutiennent une frise à triglyphes et métopes ornées d’ornements circulaires. La voûte en « berceau à pénétration » de la nef est soulignée d’un décor fort discret. Des grilles ferment les chapelles latérales aménagées le long des bas-côtés.
Entre 1750 et 1770, le curé de l’église, Jean-Baptiste Marduel se lança dans une vaste entreprise de décoration, faisant appel aux meilleurs peintres et sculpteurs de son temps, ainsi qu’au tout jeune architecte Etienne-Louis Boullée (1728-1799), qui édifia, en 1754, la chapelle du Calvaire, dans le prolongement de celle de la Vierge.
La chaire de Saint-Roch
Il confia, entre 1752 et 1758, au sculpteur Simon Challe (1719-1765) l’exécution de la chaire adossée à l’un des piliers bordant la nef. L’abat-voix, seul élément de décor témoignant aujourd’hui de l’œuvre originale de Challe, représente La Vérité relevant le voile de l’Erreur : la figure allégorique écarte une lourde draperie tournoyante de ses deux bras, serrant des feuilles de palme dans une main et une trompette dans l’autre.
Le décor de la tribune fut remplacé lors d’une première restauration en 1823, entreprise par le sculpteur Constant Delaperche. Les cinq reliefs de la cuve remontent à cette première intervention. Les cariatides en bois naturel sur lesquelles repose la tribune ont par ailleurs été exécutées par Gabriel Rispal (1892-1970) et disposées au XXe siècle.
A gauche : Joseph-Marie Vien (1716-1809), La Prédication de Saint-Denis, Salon de 1767, Paris, église Saint-Roch, chapelle Saint-Denis
A droite : Gabriel-François Doyen (1726-1806), Le Miracle des ardents, Salon de 1767, Paris, église Saint-Roch, chapelle Sainte-Geneviève
Le curé de Saint-Roch fit en outre aménager deux chapelles dans les bras du transept, qu’il confia également à l’architecte Boullée. Celui-ci créa une perspective en trompe-l’œil pour accompagner la présentation de deux grands retables. L’un, destiné à l’autel de la chapelle Saint-Denis, représente La Prédication de Saint-Denis, par Joseph-Marie Vien, et l’autre, destiné à la chapelle Sainte-Geneviève, Le Miracle des ardents, par Gabriel-François Doyen.
La chapelle de la Vierge
Conçue par Jules Hardouin-Mansart, la chapelle de la Vierge est entourée d’un déambulatoire qui prolonge le chœur, vers le nord, et sépare cette chapelle de celle du Calvaire, située plus au nord.
La peinture de la coupole de la chapelle de la Vierge, par Pierre, et La Gloire divine de Falconnet
Pour la chapelle de la Vierge, Jean-Baptiste Marduel confia la décoration de la coupole à un artiste en pleine ascension : Jean-Baptiste-Marie Pierre, ancien pensionnaire de l’Académie de France à Rome et fraîchement nommé professeur à l’Académie royale de peinture et de sculpture. Entre 1749 et 1756, Pierre composa un grand décor peint sur le thème de L’Assomption.
Pour le décor sculpté, il fit appel à un jeune académicien, Etienne-Maurice Falconet, placé un peu plus tard sous la protection de Madame de Pompadour. Falconet sculpta une Gloire divine (1755), sur le modèle de celle de Saint-Pierre de Rome, qui enserre l’oculus axial de la chapelle, orné d’un vitrail portant le symbole de la Trinité. Il disposa enfin les figures de L’Annonciation (disparues) sous La Gloire divine et installa, dans la chapelle du Calvaire, une rocaille avec un Christ en croix (également disparue).
Michel Anguier (1612-1686)
La Nativité, 1665-1667, marbre, Paris, église Saint-Roch, chapelle de la Vierge
Au début du XIXe siècle, le groupe de La Nativité du sculpteur Michel Anguier, provenant du maître-autel du Val-de-Grâce, remplaça L’Annonciation de Falconet, disparue à la Révolution. Les rayons et les nuages parsemés de têtes de chérubins de l’imposante Gloire divine surplombent désormais les trois figures de la Sainte Famille d’Anguier.
De part et d’autre de l’autel, un Saint Jérôme, sculpté par Lambert-Sigisbert Adam en 1752, et une Sainte Barbe, exécutée par un sculpteur anonyme en 1700, ont rejoint le groupe sculpté d’Anguier.
Le buste d’André Le Nôtre
Plusieurs tombes de l’église Saint-Roch furent profanées et détruites pendant la période révolutionnaire. André Le Nôtre (1613-1700), marguillier de la paroisse, avait été inhumé dans la chapelle de son saint patron, dont il avait la concession. Seul le buste du célèbre jardinier de Louis XIV, par Antoine Coysevox, échappa aux destructions. Replacé sur une console fixée contre l’un des piliers du transept, le buste domine une grande table de marbre noir qui restitue la longue épitaphe à la gloire du défunt.
L’église Saint-Roch fut également le témoin de la répression de l’insurrection royaliste du 13 vendémiaire an IV (5 octobre 1795) par Napoléon Bonaparte.
A gauche : Lépicié, d’après Le Moyne et Desjardins, Tombeau de Pierre Mignard, 1743, gravure, BNF, Estampes
A droite : J-B. II Le Moyne et M. Desjardins, Tombeau de Pierre Mignard, Paris, église Saint-Roch
Au début du XIXe siècle, Saint-Roch abrita plusieurs chefs-d’œuvre de l’art funéraire et religieux d’églises voisines, dont la démolition avait été ordonnée.
Les obsèques du peintre Pierre Mignard avaient eu lieu à Saint-Roch, sa paroisse, le 31 mai 1695, mais l’artiste fut inhumé aux Jacobins-Saint-Honoré, où sa fille Catherine, comtesse de Feuquières, lui consacra, en 1735, un mausolée de granit gris.
Elle proposa alors d’employer le buste que le célèbre Desjardins avait réalisé de son père à l’âge de cinquante-neuf ans et demanda à Jean-Baptiste II Le Moyne de la représenter toujours jeune, agenouillée, dans l’attitude de la douleur, au pied du mausolée, où les génies de la Peinture paraissent désolés. Une pyramide de marbre gris s’élevait derrière le buste. Dans la partie supérieure du tombeau, la figure du Temps, tenant la faux, relevait le grand voile couvrant le sommet de la pyramide et couvrant le buste du peintre.
En 1790, la suppression du couvent des Jacobins imposa le transfert précipité du mausolée de Mignard à Saint-Roch. Au début du XIXe siècle, la figure agenouillée de Catherine Mignard fut retirée et transformée en Madeleine pleurant aux pieds de Jésus crucifié dans une autre chapelle de l’église. Le tombeau est désormais une évocation de l’œuvre originale : la figure de la Mort, la draperie, la pyramide et les anges pleureurs ont disparu. Le buste du père et la statue de sa fille ont été réunis, mais le résultat ne rend plus compte de la composition ambitieuse que Le Moyne avait imaginée en 1735.
Jean-Baptiste I Lemoyne (1679-1731), terminé par son neveu Jean-Baptiste II (1704-1778)
Le Baptême du Christ, 1731, marbre, église Saint-Roch, chapelle Saint-Jean-Baptiste
Ce groupe sculpté de Lemoyne l’Ancien, d’inspiration baroque, fut réalisé pour l’autel de l’église Saint-Jean-en-Grève, qui se situait entre l’Hôtel de ville et l’église Saint-Gervais-Saint-Protais, sur le tracé de l’actuelle rue Lobau. Échappant à la destruction de l’église, entre 1797 et 1802, le marbre fut transporté à Saint-Roch, dans la chapelle Saint-Jean-Baptiste. Ce bel ouvrage réunit les talents de Lemoyne l’ancien et de son neveu, dit Jean-Baptiste II, fameux portraitiste du roi Louis XV, qui acheva la taille après la mort de son oncle.
Le tombeau du duc Charles de Créquy (1624-1687)
Dressé en 1688 dans une chapelle de l’église des Capucines sur les plans de Jules Hardouin-Mansart, le tombeau du duc de Créquy se composait d’un piédestal aux armes du défunt, flanqué de deux allégories : La Religion et de La Libéralité. La figure du défunt, sculptée par Pierre Mazeline (1633-1708) et Simon Hurtrelle (1648-1724), se présentait demi-allongée sur un grand sarcophage de marbre noir, près d’une femme en pleurs, figurant L’Espérance ou La Ville de Paris.
Démontées et vendues à la Révolution, les grandes figures du tombeau furent rachetées par Alexandre Lenoir et placées au musée des Monuments français en 1798. Les deux allégories furent envoyées dans l’église des Invalides entre 1804 et 1809, où elles servirent au décor des chapelles Saint-Grégoire et Saint-Augustin. Le groupe du gisant et de L’Espérance furent transférées à Saint-Roch en 1819.
Le grand décor de la coupole
Les derniers embellissements de l’église Saint-Roch remontent au Second Empire : nous les devons à Adolphe Roger (1800-1880), qui exécuta, en 1864, les peintures du chœur (saints et anges) et décora la coupole (Le Triomphe du Christ) et ses pendentifs (les archanges Gabriel, Michel, Uriel et Gabriel), à la croisée du transept. La peinture de la coupole s’articule autour d’une grande rosace en relief, rehaussée d’or : elle montre Dieu le Père et le Christ ; Le Christ entre deux anges, figurant l’Ascension ; Le Christ entre saint Léon et saint Roch, figurant la glorification de l’Église et Le Christ entre deux anges figurant La Résurrection.
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